Mon nom : Clara Muller. Ma ville, Paris en 2015 – capitale coupée en deux, Ville Haute et Ville Basse. Mon univers, les quartiers chics de la Ville Haute. Au lycée, ils passent leurs journées à m’insulter. M’appellent FFO, Fille Frappée d’Opprobre. Tout ça parce que je suis née in vitro, grâce à un logiciel de procréation. Mes séquelles : affectation de la structure psychique – chaque nuit, je me balade dans la Ville Basse via une connexion au Vortex Urbain. C’est comme ça que j’ai rencontré le Vengeur Toxique, un super-héros cabossé et super mignon. Personne ne me croit, à part Karine, une FFO, comme moi. Et amoureuse d’un de ces CP (Connards Populaires) qui nous mènent la vie dure. Sûr que cette histoire va mal finir : quand vous lirez ce Journal Infirme, je serai morte…
Mon avis
J’ai parcouru quelques critiques de ce livre pendant ma lecture, et j’ai remarqué qu’on y déplorait souvent le vocabulaire fleuri qui y est pratiqué. Pour ma part, j’ai kiffé. Je dois bien avouer que si les règles de bienséance ne m’y obligeaient pas au quotidien (surtout au boulot), ce serait un peu ma façon de m’exprimer. Je suis partisane de la simplicité et dire « il me casse les couilles » est bien plus précis et expressif que dire « je ressens comme une légère irritation face à cet individu quelque peu inconvenant ». En plus, ça va plus vite.
Et puis, malgré tout, le style est d’une fluidité des plus agréables. Les mots, malgré leur rudesse, coulent par les yeux jusque dans le cerveau et vont percuter tout ça avec une force à laquelle on ne s’attendrait pas, dans le journal « infirme » d’une ado un peu en marge. Karim Madani les manie avec beaucoup de doigté et fait des expressions les plus vulgaires des instants de puissante poésie.
Pour ce qui est de l’histoire, que dire… je ne dirais pas qu’elle révolutionne le genre. L’originalité réside surtout dans l’atmosphère, qui dépeint une adolescence à la fois obnubilée et dénaturée par les préjugés, la cruauté, la violence, le sexe, la drogue… et qui pourtant s’accroche désespérément à une part d’innocence et d’espoir. Au final, on se croirait en 2012.
Dans tout ça, Clara, jeune fille intelligente et très humaine, se débat comme elle peut dans ce monde d’une cruauté déconcertante, et je trouve qu’au final, elle se débrouille pas si mal. On ne peut que s’attacher à elle et croiser les doigts très fort pour qu’elle s’en sorte, comme elle le mérite. Sauf que, dès la première page, aucun doute n’est permis : elle ne s’en sortira pas. Je n’entrerai pas dans les détails mais, pourtant, cette fin a eu pour moi un goût de happy end. Comment faire un happy end de la mort de la fille pour qui on a croisé les doigts pendant 263 pages ? Là réside, à mon sens, toute la force de ce livre et tout le talent de son auteur.
Encore une fois, un grand merci aux Éditions Sarbacane !
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